Un premier volume puisait déjà dans les messes de Titelouze récemment découvertes dans une bibliothèque parisienne. En plus d’être l’auteur de deux recueils de pièces d’orgue d’une importance historique depuis longtemps reconnue, nous découvrirons qu’il était aussi l’un des compositeurs de musique vocale les plus considérables de son temps.
Lorsqu’il se voit nommé organiste de la Cathédrale de Rouen en 1588, bruissent les derniers soubresauts des guerres de religion. Le retour de la paix va permettre le développement d’une activité musicale d’ailleurs jamais interrompue. Titelouze n’était pas maître de chapelle : sa production répondait donc moins à de la musique d’usage (elle ne rentrera que tardivement au répertoire de la maîtrise) qu’à des demandes pour des cérémonies particulières, dont témoigne le titre de Missa votiva. Au savant contrepoint de cet ensemble à quatre voix répond la riche texture à six de la Missa simplici corde. On ne pouvait mieux se plier aux prescriptions du Concile de Trente, la magnificence s’y accordant avec une parfaite intelligibilité du texte. Les Meslanges ont l’enthousiasme des défricheurs. La doublure des voix par des cornets, sacqueboutes, serpent ou violes crée de riches couleurs, sans jamais masquer la profération d’un texte savamment prosodié qui est leur raison d’être. Dans ce contexte, les pièces d’orgue prennent un sens nouveau, d’autant que le Magnificat se voit alterné non avec du plain-chant monodique, mais avec de la polyphonie (Bournonville, 1614). C’est donc la même musique qui circule du lutrin à la tribune, les accents des voix trouvant une subtile équivalence dans les articulations et l’ornementation qu’ajoute François Ménissier selon les préceptes de l’auteur. La cohérence est telle qu’au détour d’un enchaînement, le miracle se produit : la première note de l’orgue semble sortir d’un gosier…
Vincent Genvrin